...Pareil à ce que nous sommes, il est en lui-même un contraste de ne pas vouloir voir ce qu’il ne faut pas voir. De celui qui, pour sa sérénité et son confort, combat son questionnement et la quête de ses racines, de sa préservation. Il faisait confiance, mais discrètement au conquérant.
Comme représentant d’un peuple dominé depuis trois siècles, qu’il sentait nécessairement le poids, son mot était de ne pas en avoir. Il a été ce que la plupart des Québécois voulaient : se contenter d’un petit pain, d’être fidèle pour ne pas paraître des révoltés, des révolutionnaires.
Ce que nos parents nous ont transmis à moi et les treize autres de mes frères et sœurs que nous étions : « rester tranquille ». Lui, Jean Béliveau, il a réussi à mettre ce mot en pratique jusqu’à sa mort.
Il véhicule le paradoxe de la vedette discrète sans patiner.
http://www.vigile.net/Jean-Beliveau-la-tranquillite-sans
Du respect pour Béliveau
La postérité culturelle de Béliveau n'est pas que francophone. Il est chanté par Jane Siberry (Hockey). Pour Mordecai Richler, Béliveau est un «artiste consommé» (The Fall of the Montréal Canadiens). Hugh Hood, l'auteur d'une hagiographie (Strength Down Centre: The Jean Béliveau Story), est fasciné par son «magnétisme». Leslie McFarlane l'a filmé dans Here's Hockey! Rick Salutin lui donne la parole dans sa pièce Les Canadiens. C'est un héros from coast to coast, dont on ne compte plus les biographies et portraits dans les deux langues officielles.
Peut-on dire de lui, comme de Maurice Richard, que c'est un mythe national? Non, et cela, pour au moins deux raisons. Si Béliveau a été du côté de la contestation, ce n'est qu'au début de sa carrière; par la suite, son conservatisme et sa réussite sociale ont empêché plusieurs de ses concitoyens de s'identifier à lui. Or, en matière de mythe sportif, l'identification est capitale. Surtout, il n'y a pas eu, dans sa carrière et dans sa vie, un moment déterminant: le 17 mars 1955, des milliers de Montréalais participaient à ce qui est devenu «l'émeute Maurice Richard». On ne descend pas dans la rue pour un grand joueur, même s'il est le plus «élégant» de tous. On le respecte, mais on ne l'idolâtre pas.
http://www.ledevoir.com/sports/hockey/330370/jean-beliveau-le-gros-bill-a-80-ans