Cette voix, on ne l’a pas oubliée. Ces yeux bleus et son sourire franc non plus. Surtout quand il regardait le public, assis à son piano, sur la scène.
Avant Offenbach, on n’avait jamais entendu un amalgame de blues-rock québécois aussi vif. Gerry avait un caractère bouillant, des r bien roulés à la montréalaise, un joual excessif et une ferveur presque animale, comme si on venait de le libérer d’une cage.
Avec Gerry, il y a eu rencontre de plusieurs publics : les gars de bicycle, les rockeurs de taverne, les amateurs de blues, les poètes de rue, les jeunes.
Offenbach prend forme en 1969 et présente, deux ans plus tard, l’album Offenbach Soap Opera avec l’aguichante Câline de blues, une première incontournable. Cependant, les radios ne sont pas si réceptives. Pour plusieurs, c’est choquant, presque trop.
Faut dire qu’Offenbach ne fait pas dans la dentelle : spectacles improvisés, messe rock à l’oratoire Saint-Joseph (album Saint-Chrone de Néant), un documentaire (et un album) titré Tabarnac.
Mais on s’est habitué. On a compris qu’il avait besoin de crier, surtout avec le disque éponyme de 1977, qui dévoile La voix que j’ai et Chu un rocker. Offenbach détonne dans un paysage québécois alors dominé par Beau Dommage et Harmonium. Gerry Boulet, lui, a plutôt envie de se frotter au jazz. Il joint alors le groupe au big band du grand Vic Vogel pour Offenbach en fusion. Voilà un premier disque d’or pour Offenbach! Puis, en 1980, il est le premier groupe québécois à faire le Forum de Montréal.
Le groupe se sépare officiellement en 1985, peu après la parution du premier disque solo de Gerry, Presque 40 ans de blues.
Le rockeur nous convie ensuite à un Rendez-vous doux en 1988. Il y a plusieurs moments de tendresse sur ce disque platine que l’on connaît par cœur : Une dernière fois, Un beau grand bateau et Les yeux du cœur avec Marjo. Michel Rivard signe les textes de La femme d’or et de Toujours vivant. Le succès est total, mais à ce moment, Gerry Boulet combat déjà un cancer. Il meurt le 18 juillet 1990.
Vingt-cinq ans après son départ, on se rappelle aussi sa reprise authentique de L’hymne à l’amour de Piaf, une autre occasion d’entendre sa tendresse. Et on se dit bien sûr qu’il est parti trop tôt (44 ans), qu’on en aurait pris bien plus de sa voix d’écorché et de son phrasé impitoyable. Mais qu’au moins, il a été au bout de sa track,au fond de sa musique.
Marci, Gerry.
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